Le cabinet Nos départements Notre équipe Nos outils Nos articles Contact
image de l'article

Le droit de demander des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres et le droit de demander une formule souple de travail

Les conventions collectives de travail 161 et 162 prévoient la possibilité pour les travailleurs de demander de nouvelles formules de travail, mais prévoient également des protections spécifiques contre le licenciement à l’égard des travailleurs qui en demandent l’application. Le point:

Les nouvelles CCT n° 161 et 162

Cet automne 2022 a été marqué par de nombreuses nouveautés en droit social : modification du parcours de réintégration, Job deal, mais aussi l’adoption de deux nouvelles conventions collectives de travail aux intitulés relativement larges :

Il est intéressant de préciser que ces deux nouveaux textes ont pour objectif de transposer et de mettre en œuvre deux Directives européennes, à savoir :

Il s’agit donc ici pour l’Etat belge, de se mettre en conformité avec la législation européenne.
Ces conventions collectives de travail, entrées en vigueur le 1er octobre 2022, prévoient ainsi la possibilité pour les travailleurs de demander de nouvelles formules de travail, mais prévoient également des protections spécifiques contre le licenciement à l’égard des travailleurs qui en demandent l’application.
Nous vous proposons de passer en revue ces deux nouvelles conventions collectives de travail, afin de vous permettre de mieux en appréhender le contenu et la mise en œuvre. 

La CCT n°161 du 27 septembre 2022 concernant le droit de demander une forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres

Avant toute chose que signifie la formulation « une forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres » ?
Le commentaire officiel de la CCT n°161 indique qu’il revient au travailler de déterminer ce qui constitue, pour lui, une forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres. Il s’agit donc d’une interprétation subjective.
Ce commentaire officiel se risque toutefois à proposer quelques exemples :

L’objectif de cette CCT est donc clairement de favoriser les emplois fixes et durables dans le temps.
Bien entendu, la possibilité pour un travailleur de demander des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres est soumise à certaines conditions.
Le travailleur doit notamment présenter une ancienneté de six mois auprès du même employeur.
À noter, que les périodes d’occupation auprès du même employeur sont additionnées et que les périodes entre différents contrats à durée déterminée sont neutralisées pour le calcul de l’ancienneté.
Par ailleurs, pour pouvoir bénéficier d’une nouvelle forme de travail les conditions suivantes sont requises :

Ces conditions peuvent être mises en œuvre différemment soit au niveau sectoriel par la conclusion d’une convention collective de travail, soit au niveau de l’entreprise par une CCT d’entreprise ou un accord avec la délégation syndicale ou encore par un accord individuel avec le travailleur.
Le droit de demander une forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres requiert bien entendu le respect d’une procédure spécifique :

  1. La demande du travailleur : le travailleur doit introduire sa demande par écrit à son employeur au moins 3 mois avant le début souhaité de la nouvelle forme de travail. Cette demande contient la mention expresse de la convention collective de travail n°161, l’indication de la forme d’emploi souhaitée et la date de début de la nouvelle forme d’emploi souhaitée. Le travailleur ne peut pas faire plus d’une demande par période de 12 mois.
  2. Réponse de l’employeur : l’employeur doit adresser une réponse écrite à la demande du travailleur dans le mois qui suit ladite demande (si votre entreprise compte moins de 20 travailleurs, vous bénéficiez de 2 mois pour répondre)

Par sa réponse l’employeur peut :

En cas d’accord de la demande, de report de celle-ci ou d’accord du travailleur sur la contreproposition de l’employeur, les parties doivent s’accorder sur les modalités concrètes de la forme d’emploi.
En cas de refus de la demande du travailleur, la réponse de l’employeur doit être motivée en indiquant les raisons précises du refus et de quelle manière il a tenu compte des besoins du travailleur et de l’entreprise dans sa décision.
Le refus peut être motivé par des motifs liés au fonctionnement de l’entreprise (par exemple les ressources, la capacité opérationnelle de l’entreprise et la non-disponibilité de la forme d’emploi demandée par le travailleur) ou par des motifs liés au travailleur (par exemple les qualifications ou compétences insuffisantes du travailleur pour la forme d’emploi demandée).

 

Enfin, il est à souligner que cette CCT n°161 prévoit des garanties pour le travailleur qui exerce son droit à demander une forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres.
Plus précisément, l’employeur ne peut adopter aucune mesure défavorable à l’encontre du travailleur en question et ne peut pas non plus le licencier, sauf pour des motifs étrangers à l’exercice de son droit.
La protection du travailleur sort ses effets à partir de sa demande écrite et cesse 2 mois après le début de l’exercice de la nouvelle forme d’emploi ou 2 mois après le refus de la demande par l’employeur.
En dehors de ces deux cas, lorsqu’aucune nouvelle forme d’emploi n’est mise en œuvre, la protection prend fin 2 mois après la date de début demandée par le travailleur.
Si le travailleur parvient à établir devant le tribunal compétent qu’il a fait l’objet d’une mesure défavorable, l’employeur encourt le risque de devoir lui verser une indemnité correspondant au minimum à 2 mois de rémunération et au maximum à 3 mois de rémunération.
Attention
 : La CCT prévoit expressément que le non-renouvellement d’un contrat de travail à durée déterminée d’un travailleur ayant demandé une forme d’emploi plus prévisible et plus sûre peut être considéré comme une mesure défavorable pour laquelle une indemnité est due !
De même, la protection contre le licenciement du travailleur sort ses effets à partir de sa demande écrite et cesse 2 mois après le début de l’exercice de la nouvelle forme d’emploi ou 2 mois après le refus de la demande par l’employeur.
Si le travailleur parvient à établir devant le tribunal compétent des faits qui laissent présumer qu’il aurait été licencié pour des motifs liés à l’exercice des droits découlant de la CCT n°161, et que l’employeur ne parvient à démontrer que le licenciement était fondé sur des motifs étrangers à l’exercice de ces droits, ce dernier encourt le risque de devoir lui verser une indemnité correspondant au minimum à 4 mois de rémunération et au maximum à 6 mois de rémunération.

 

La CCT n°162 du 27 septembre 2022 instituant un droit à demander une formule souple de travail

Tout comme pour la CCT n°161, on est en droit de se demander ce que signifie « formule souple de travail ».
La CCT n°162 est plus claire que la CCT n°161 sur ce point, étant donné qu’elle prévoit expressément les cas de figure dans lesquels un travailleur peut demander une formule souple de travail :

Pour pouvoir demander une formule souple de travail, le travailleur doit avoir une ancienneté de 6 mois auprès du même employeur.
À noter, notamment pour les travailleurs occupés dans le cadre de contrat de travail à durée déterminée, que les périodes d’interruption entre deux contrats sont neutralisées pour le calcul de l’ancienneté.
Selon le commentaire officiel de la CCT n°162, une formule souple de travail est un aménagement des modalités de travail existantes du travailleur.
L’article 7 de la CCT n°162 prévoit de manière non-exhaustive les adaptations suivantes :

Le travailleur est libre de demander n’importe qu’elle mesure aménageant son régime de travail. Si la mesure demandée, n’existe pas encore au sein de l’entreprise, une procédure de concertation sociale est mise à l’ordre du jour au sein de l’organe compétent.
Le travailleur peut demander une formule souple de travail pour une période maximale de 12 mois (une prolongation peut être prévue dans certains cas spécifiques).
Le droit de demander une formule souple de travail requiert bien entendu le respect d’une procédure spécifique :

  1. La demande du travailleur : le travailleur doit introduire sa demande par écrit à son employeur au moins 3 mois avant le début souhaité de la nouvelle forme de travail. Cette demande contient la mention expresse de la convention collective de travail n°162, l’indication de la forme souple d’emploi souhaitée, le but des soins à prodiguer pour lequel la formule souple est demandée et la date de début et de fin de la formule souple de travail souhaitée.
  2. Réponse de l’employeur : l’employeur doit adresser une réponse écrite et motivée à la demande du travailleur dans le mois qui suit ladite demande (si votre entreprise compte moins de 20 travailleurs, vous bénéficiez de 2 mois pour répondre)

Par sa réponse l’employeur peut :

À tout moment, le travailleur peut adresser à son employeur la demande écrite motivée de suspendre ou de mettre fin anticipativement à la formule souple de travail mise en place.
Le travailleur adresse une réponse écrite et motivée à cette demande au plus tard dans les 14 jours.
Par ailleurs, en cas de survenance de nouvelles nécessités exceptionnelles imprévues, indépendantes de la volonté de l’employeur et mettant en péril l’organisation du travail, l’employeur peut demander par écrit au travailleur de suspendre ou de mettre fin anticipativement à la formule souple de travail.
Le travailleur répond à cette demande par écrit dans les 14 jours.

 

Enfin, la CCT n°162 prévoit également des garanties au travailleur qui exerce son droit à demander une formule souple de travail.
Plus précisément l’employeur ne peut adopter aucune mesure défavorable à l’encontre du travailleur en question et ne peut pas non plus le licencier, sauf pour des motifs étrangers à l’exercice de son droit.
La protection du travailleur sort ses effets à partir de sa demande écrite et cesse 2 mois après la date de fin de la formule souple ou 2 mois après le refus de la demande par l’employeur.
En dehors de ces deux cas, lorsqu’aucune formule souple n’est mise en œuvre, la protection prend fin 2 mois après la date de début demandée par le travailleur.
Si le travailleur parvient à démontrer qu’il a fait l’objet d’un traitement défavorable, l’employeur encourt le risque de devoir lui verser une indemnité correspondant au minimum à 2 mois de rémunération et au maximum à 3 mois de rémunération.
La CCT prévoit expressément que le non-renouvellement d’un contrat de travail à durée déterminée d’un travailleur ayant demandé une formule souple de travail peut être considéré comme une mesure défavorable pour laquelle une indemnité est due!
De même, la protection contre le licenciement du travailleur sort ses effets à partir de sa demande écrite et cesse 2 mois après la date de fin de la formule souple de travail ou 2 mois après la date du refus de la demande par l’employeur.
En dehors de ces deux cas, lorsqu’aucune formule souple n’est mise en œuvre, la protection prend fin 2 mois après la date de début demandée par le travailleur.
Si le travailleur parvient à établir devant le tribunal compétent des faits qui laissent présumer qu’il aurait été licencié pour des motifs liés à l’exercice des droits découlant de la CCT n°162, et que l’employeur ne parvient à démontrer que le licenciement était fondé sur des motifs étrangers à l’exercice de ces droits, ce dernier encourt le risque de devoir lui verser une indemnité correspondant au minimum à 4 mois de rémunération et au maximum à 6 mois de rémunération.

 

Caroline Boumal

 

Sources :

En continuant à naviguer sur ce site, vous agréez à l’utilisation de cookies en vue du bon fonctionnement du site.
J'accepte