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Céder ou acquérir un fonds de commerce: quelques clés pour réussir…

Céder son entreprise est l’occasion de réaliser de nouveaux investissements, de donner une nouvelle orientation à sa carrière professionnelle ou de clôturer celle-ci en beauté. A l’inverse, acquérir une entreprise existante est un moyen efficace d’accéder rapidement à une clientèle d’ores et déjà constituée, parfois fermement liée à l’implantation d’un point de vente ou à une marque renommée. L’opération de transfert d’une entreprise peut se réaliser par plusieurs biais, dont notamment la vente de son fonds de commerce ou la cession des actions de la société qui exploite l’entreprise. Le choix de l’une ou l’autre voie doit être posé en connaissance de cause, tant leurs incidences fiscales respectives sont différentes.

Nous nous concentrons dans les lignes qui suivent sur la cession du fonds de commerce (aussi qualifiée de vente d’actifs ou d’« asset deal ») et présentons quelques points d’attention indispensables à la réussite de cette opération.

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  1. Réaliser un inventaire précis des actifs à céder

Aux yeux des entrepreneurs, le fonds de commerce est avant tout un ensemble d’actifs (tel le nom commercial, l’enseigne, la marque, ou encore le fichiers clients, le stock, etc.). Malgré leur diversité, ces actifs concourent à la réalisation d’un objectif commun et essentiel : acquérir et fidéliser la clientèle de l’entreprise.
Le droit, quant à lui, ne reconnaît pas d’existence propre à cet ensemble[1] : les biens corporels et incorporels qui composent le fonds de commerce conservent en tout temps leur individualité malgré leur finalité commune[2].
Derrière la cession d’un fonds de commerce, se cachent en réalité plusieurs ventes soumises à des conditions de validité et d’opposabilité potentiellement différentes.
Autre conséquence concrète de cette absence d’appréhension du fonds de commerce par le droit : le périmètre des actifs cédés est laissé à la discrétion des parties.
Le contenu d’un fonds de commerce est donc variable, comme le sont d’ailleurs les facteurs de maintien de la clientèle d’un secteur d’activité à l’autre.

La première clé d’une cession de fonds de commerce réussie est donc la réalisation d’un inventaire précis des actifs cédés. En particulier, il y aura lieu de différer l’inventaire du stock au jour du closing puisque celui-ci est appelé à évoluer jusqu’à la dernière minute…

Nous présentons ci-dessous brièvement trois clés supplémentaires (parmi tant d’autres !) que les parties veilleront à aborder à l’occasion des négociations précontractuelles.

  1. Respecter les obligations particulières du cessionnaire vis-à-vis des travailleurs.

Le transfert conventionnel d’entreprise entre un employeur cédant et un employeur cessionnaire est encadré par la C.C.T. n°32bis qui met en place un système de protection des travailleurs.
En application des dispositions de celle-ci, les droits et obligations qui résultent, pour le cédant, des contrats de travail existant à la date de la cession sont transférés au cessionnaire.
Le travailleur transféré est ainsi en droit d’exiger du cessionnaire le maintien de ses conditions individuelles et collectives de travail.
L’obligation du cessionnaire de prendre à son service l’ensemble du personnel occupé lors du transfert s’accompagne en outre d’une interdiction de principe de licencier si le motif du licenciement n’est autre que le changement d’employeur.
Cette interdiction concerne les licenciements décidés le jour du transfert, mais également ceux qui interviennent dans les jours qui précèdent la date de reprise ou même éventuellement les licenciements postérieurs[3].

  1. Mesurer les risques particuliers en cas de cession d’une entreprise en difficultés.

Les créanciers du cédant pourraient considérer que la cession a été réalisée en fraude de leurs droits. C’est le cas lorsque la contrepartie financière de la cession est inexistante ou manifestement insuffisante.
En cas de faillite subséquente du cédant, certaines cessions ont été jugées inopposables à la masse des créanciers.
Le cessionnaire n’a d’autre choix dans cette hypothèse - heureusement peu fréquente - que de restituer les actifs cédés au curateur en échange d’une créance déclarée au passif de la faillite dont le recouvrement, faut-il le préciser, s’avérera particulièrement hasardeux[4].

  1. Eviter la solidarité en matière de dettes sociales ou fiscales.

La loi protège l’administration fiscale et l’ONSS lorsque ceux-ci sont créanciers du cédant en imposant que la cession leur soit notifiée.
Cette notification fait courir un délai endéans lequel la cession n’est pas opposable à l’administration, ce qui signifie concrètement que celle-ci est libre de saisir les actifs du fonds de commerce entre les mains du cessionnaire, de les vendre et d’affecter ensuite le produit de cette vente à l’apurement des dettes fiscales et sociales du cédant.
Après l’échéance de ce délai, le cessionnaire reste (dans une certaine mesure) solidairement tenu des dettes fiscales et sociales du cédant[5].
Pour éviter ces désagréments, le cessionnaire avisé exigera que le cédant lui garantisse qu’il n’est redevable d’aucune somme à titre de TVA, d’ISOC, et/ou de cotisations de sécurité sociale auprès de l’ONSS ou de l’INASTI (sécurité sociale des travailleurs indépendants).
Il réclamera en outre la production, dès avant le transfert de propriété du fonds de commerce, de certificats émis par les différentes administrations attestant de cette absence de dettes fiscales et sociales.

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La cession d’un fonds de commerce est une opération certes courante mais parfois complexe. Elle n’est jamais dénuée de risques, tant pour le vendeur (cédant) que l’acquéreur du fonds de commerce (cessionnaire). Les avocats du département Sociétés & Associations du cabinet WALK assistent régulièrement leurs clients dans le cadre de la négociation et de la rédaction de conventions de cession, mais aussi dans la réalisation de l’audit juridique d’une société cible.

 

Nicolas Wouters

 

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[1] Si ce n’est sous la forme d’une « universalité de fait ».

[2] J. VAN RYN et J. HEENEN, Principes de droit commercial, t.1, 2ème éd., Bruxelles, Bruylant, n°439.

[3] J.-F. LECLERCQ, L. PELTZER, et E. PLASSCHAERT, La cession d'entreprise : les aspects sociaux, Bruxelles, Larcier, 2011, p. 200.

[4] D. GOL, « Transfert d’entreprises en difficultés en dehors des procédures collectives – Quelques points d’attention », La cession d’une entreprise en difficulté, Bruxelles, Larcier, 2015, pp. 10 et s.

[5] G. BEVERS, J. VAN RIEL et W. DE COCK, « Vous envisagez de reprendre une activité ? Pensez à tous les certificats », Pacioli, n°411, pp. 1 et s.

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